Charles IX et ma petite entreprise

charles X

A partir du 1er mai 1561, Charles IX offre un bouquet de muguet à chaque dame de la cour

Voici ce que j’ai déclaré ce mercredi 1er mai 2019 à l’occasion de la remise des médailles du travail de Templemars

Nous nous retrouvons avec vous et avec les élus du conseil municipal, comme chaque année à l’occasion du 1er mai, et ainsi que nous en avons pris l’habitude je veux saluer celles et ceux que nous allons honorer, mais aussi quelques absents de cette fête.

C’est peut-être notre voisine, notre voisin, la fille ou le fils de notre voisin, à la recherche d’un emploi, ou d’un emploi à temps plein, correctement rémunéré.

Vous le savez, notre pays, mais aussi nos voisins européens traversent depuis bien longtemps, trop longtemps, une crise qui nous frappe au cœur. Les chiffres récents sont en amélioration, mais chacun sait que la colère, le désespoir sont présents dans notre société, et pas seulement lors des manifestations des gilets jaunes, qui traduisent pourtant ce malaise.

Avec 16,22 millions de personnes sans emploi, le taux de chômage dans l’Union européenne atteint 6,5% de la population active en janvier 2019, et 7,8% dans la zone euro, à son taux le plus bas depuis 2008.

En France, le nombre de demandeurs d’emploi sans aucune activité (catégorie A) est désormais d’un peu moins de 3,65 millions de personnes (11,45 % de la population active), soit une baisse de 0,7% depuis le début de l’année, et des chiffres en diminution de 1,5 % en un an. Dans la région Hauts-de-France, le chômage atteint 11,3 % de la population active. Pour le département du Nord, le taux est de 11,9 %.

Ceux qui bénéficient le plus de cette évolution favorable sont les personnes de 25 à 49 ans (− 1 % au premier trimestre, en métropole). Autre indicateur encourageant : les seniors (plus de 50 ans)  à la recherche d’une activité voient également leurs effectifs diminuer légèrement (− 0,4 % en trois mois).

Nous pouvons certes nous rassurer : la métropole lilloise s’en sort souvent un peu mieux que l’ensemble de la région, et le sud de la métropole où se situe Templemars est plutôt un peu moins malade que d’autres secteurs. Notre commune dénombre ainsi autour de 170 inscrits à Pôle Emploi, soit un peu moins de 10% de la population active et 5% de la population totale (3500 habitants). C’est honorable, mais c’est déjà beaucoup trop. Et parmi les demandeurs d’emploi on compte un fort pourcentage de jeunes (près de 25%).

Nous essayons de gérer cette situation avec nos moyens, par exemple en ne touchant pas à la fiscalité, pour ne pas alourdir les charges qui pèsent sur chaque citoyen, mais aussi en essayant de répartir au mieux le coût des services que nous proposons au public, et en appliquant sur l’ensemble de nos tarifs des critères sociaux.

Nous travaillons aussi sur ces sujets-là avec nos voisins, et nous avons mis en place une batterie d’outils intercommunaux pour aider à l’insertion professionnelle, au reclassement, à la recherche d’emploi, à la formation professionnelle. La Maison de l’emploi métropole Sud (la MDE) couvre un territoire de 43 communes de la métropole et du sud de la métropole. Au sein de cette entité, nous sommes également regroupés au sein d’un SIVU pour l’insertion professionnelle qui regroupe Lesquin, Lezennes, Ronchin, Faches-Thumesnil, Vendeville, Seclin, Wattignies et Templemars.

Ces structures partenariales cherchent à structurer l’offre d’emploi sur leur territoire, à améliorer l’accueil  des demandeurs d’emploi, à les aider à constituer un parcours d’insertion, et à renforcer les liens avec le monde du travail, à développer ce qu’on appelle la clause sociale dans les chantiers publics.

Nous sommes également présents avec Odile Wattrelot et sa commission de l’action sociale, des personnes âgées et de l’emploi, le CCAS, l’aide alimentaire de la Croix rouge, et tous les services que nous avons mis en place pour toute la population et notamment les plus âgés, les handicapés, les plus fragiles. Nous le faisons aussi en aidant les plus démunis à participer à la vie associative, parce que ce sont souvent ceux qui en ont le plus besoin. Nous éditons enfin une Gazette de l’emploi destinée à mettre en relation les demandeurs d’emploi de la commune et les entreprises locales.

Vous qui êtes ici aujourd’hui, que nous allons récompenser pour vos longues années de travail, ainsi que vos amis, votre famille, vous savez particulièrement bien combien ce travail est source de stress, de fatigue, d’épuisement physique et nerveux. Mais vous savez aussi combien il peut être source d’équilibre, d’accomplissement personnel, de bonheur.

Vous le savez, mais je ne crois pas inutile de le rappeler, l’initiateur de cette fête du travail n’est pas le maréchal Pétain, comme on se plaît parfois à le dire, mais le congrès de l’internationale socialiste qui s’est tenu à Paris en 1889, et qui souhaitait rendre hommage aux grévistes de Mac Cormik à Chicago, une usine de machines agricoles. Et nous ne pouvons l’oublier, le 1er mai 1891, à Fourmies, l’invitation de la IIe Internationale s’enracine à cause d’un nouveau drame : la troupe tire sur les ouvriers et fait dix morts.

En 1906, à l’occasion du 1er mai sera institué le repos hebdomadaire.

En 1919, toujours à cette occasion, sont établies les 8 heures quotidiennes.

En 1947, le 1er mai devient un  jour chômé et rémunéré.

Nous savons les uns et les autres que le jour de notre première embauche, nous devenons indépendants, autonomes. Le travail nous libère, nous permet de nourrir notre foyer, d’élever nos enfants, de donner un sens à notre vie.

Le travail aspire notre temps libre, notre vie, notre santé, il nous aliène et nous rend un peu esclave. Notre situation n’a certes plus grand chose à voir avec celle qu’avaient vécu les grévistes de Chicago et de Fourmies. Mais il y a encore de grands chantiers à mener à bien. J’en citerais quatre :

  • la parité, pour que les femmes gagnent le même salaire que les hommes à travail égal. Aujourd’hui, le différentiel entre les femmes et les hommes est encore de près de 30%. Il faut dans le même temps qu’elles aient les mêmes possibilités de prendre des responsabilités que les hommes  ;
  • l’intégration des travailleurs handicapés dans les entreprises et les administrations ;
  • la transformation de l’intérim et des CDD à répétition en emplois durables, justement rémunérés ;
  • la protection des travailleurs plus exposés que les autres aux risques professionnels.

Le 1er mai, nous devons aussi rappeler toute la place que les combats dont je viens de parler doivent aux syndicats, injustement décriés dans notre pays. Sans les syndicats, il n’y a pas de 1er mai, mais pas non plus de congés payés, de sécurité sociale, de caisses de retraite, de code du travail, de médecine du travail, d’inspection du travail. Toutes ces institutions ont été créées après d’âpres discussions, et sont conduites dans notre pays sous le régime du paritarisme : les représentants des travailleurs y assument leur part de direction, quand ils ne les gèrent pas.

Mais je ne voudrais pas terminer ce propos un peu sévère sans apporter une petite touche fleurie. Vous le savez, le 1er mai, c’est la fête du muguet. Cette plante venue du Japon symbolise le printemps depuis le Moyen Age. Les Celtes lui accordaient des vertus porte-bonheur, même si je rappelle  que c’est une plante particulièrement toxique. Il ne faut donc pas la porter à la bouche. Le 1er mai 1561, le roi Charles IX reçoit un brin de muguet porte-bonheur, et décide d’en offrir chaque année aux dames de la cour.

Le muguet c’est aussi la fleur des rencontres amoureuses. Pendant longtemps, dans toute l’Europe, au bal du muguet, les parents n’ont pas droit de cité, les filles s’habillent en blanc, et les garçons portent un brin de muguet à la boutonnière.

Et comme nous en avons pris l’habitude depuis de longues années, je voudrais terminer cette intervention en chanson, avec un artiste que j’ai personnellement beaucoup aimé et qui nous a quittés il y a déjà 10 ans.

Alain Bashung avait écrit cette chanson en 1994. Et vous conviendrez avec moi je pense que 25 ans après, “Ma petite entreprise” n’a pas pris une ride, qui parle certes du travail, mais nous emmène très vite dans des univers qui le dépassent, et dont chacun peut s’inspirer, en fonction de son histoire,  de ses préoccupations, de son humeur.

 

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