Easy Jet, en deux coups de biréacteur, vous transporte de Lesquin à Naples.
Vous passez ainsi de la canicule ch’ti (plus ou moins 32°C) à la torpeur napolitaine (environ 32°C).
Un chauffeur zélé vous donne ensuite quelques éléments de la conduite du sud de la Péninsule : « Beaucoup de mouvements de bras et de coups de klaxon, mais chacun demeure relax quand même. »

Arrivée à la villa San Gennariello » à Portici. Vieille demeure patricienne que les propriétaires entretiennent avec respect.

Herculanum
Après quelques minutes de sieste, le fils de la maison nous dépose à l’entrée des fouilles d’Herculanum. Nous voilà plongés dans une ville figée en 79 après JC, en même temps que Pompéi. Quatre heures plus tôt, nous prenions notre petit déjeuner à Templemars…

Il fait TRES chaud, on déambule au-milieu des villas, certaines sont modestes, d’autres plus imposantes, à plusieurs niveaux, avec des porte-à-faux audacieux. Ici une échoppe, là un gymnase, des éléments de la vie quotidienne que cette communauté nous a légués, figée par les nuées ardentes et la boue du Vésuve. Nous avons évité les carcasses statufiées par le feu de ceux qui ont été surpris dans leur vie quotidienne, leur sommeil, en contrebas, dans une cave.

Journée 2 : Vesuvio
Départ pour le Vésuve depuis la gare de Portici.
Le trajet en bus est en lui-même initiatique. Le chauffeur n’est pas avare de ses coups de trompe qui préviennent les virages et les véhicules qui arrivent en sens inverse.
Il ne nous restera QUE 300 mètres de dénivelé à pied pour arriver. La chaleur demeure écrasante, mais nous nous en sortons dignement. Le cratère est nonchalant, même si les augures et quelques scientifiques affirment qu’un jour ou l’autre le feu se rallumera, avec pertes et fracas.
Les très nombreux « trekkeurs » s’enquièrent davantage des dommages à leurs mollets que des risques qu’ils encourent.

N’empêche, le panorama sur la baie de Naples vaut largement le détour. Le retour sur le plancher des vaches est plus rapide mais tout aussi impressionnant. Les virages s’enchaînent au bord du vide à bon rythme…
Journée 3 : Amalfi
Départ en train de la gare de Portici, face aux bateaux de pécheurs, en direction de Vietri sul Mare et une somptueuse villa, le Palazzo Suriano, accrochée à la colline comme on en voit des dizaines en bateau le long de la côte.


Luxe mesuré à l‘italienne, immense sens du goût des décorateurs pour jouer avec les reliefs, la prodigalité de la nature, la présence entêtante de la Méditerranée.
Amalfi
Bus plus bateau nous amènent à Amalfi, vieille cité d’où partirent de nombreuses croisades, inspiratrice du Code maritime, du baba au limoncello, des fruits confits divers et variés.
Visite indispensable, mais TRÈS touristique, parmi les hordes de chalands.
Précision non négligeable : à Vietri sul Mare, pour la Saint André, les cloches sonnent à la volée jusqu’au bout de la nuit, entrecoupées de feux d’artifice pétaradants. Le saint patron de la ville a droit à un traitement de faveur !
Journée 4 : Ravello
Conciliabules autour d’un petit déjeuner copieux et varié avec Paolo, notre précieux hôte, sur les avantages comparés du bus et du ferry pour nous rendre à Ravello via Amalfi, en ce dimanche très chargé. Conclusion : le dimanche, privilégier le ferry, via le bus.
Nous engageons la conversation à l’arrêt de bus avec un monsieur bien sympathique, parlant un français impeccable, qui nous aiguille sur les horaires et les compagnies. Il nous détaille les nuances et les à-côtés entre les compagnies qui se partagent les lignes de bus. Des petites combinaisons aux grands arrangements, la corruption mafieuse n’est jamais loin ?
Lui regrette la France, où il a vécu de longues années, où il a fondé une famille avant de revenir avec un peu de nostalgie près de ses racines. Mais il se demande si son pays de cœur ne risque pas de tomber dans les mêmes travers que son pays natal.
Direction Ravello, au-milieu des collines de citronniers soigneusement étayés par des charpentes en bois.
Le citron n’est pas seulement de Sicile, il est aussi amalfitain. Même si les bouteilles de limoncello qu’on trouve dans toutes les boutiques de Ravello ressemblent souvent davantage à une purge chimique, le citron est ici décliné sous toutes les coutures. Les fruits sont souvent énormes, peu civilisés, mais gavés de soleil et de jus.
Ruffolo
Mais Ravello c’est surtout un écrin cher aux artistes et notamment aux musiciens. La villa Ruffolo abrite des musiciens depuis que Wagner y avait établi sa villégiature dans les années 1850. Il y a écrit Parsifal.

Autre muse de Ravello, Oscar Niemeyer, l’architecte brésilien créateur de Brasilia a construit ici une conque destinée à accueillir des concerts quand ceux-ci n’ont pas lieu en plein air face à la mer en juillet et en août, à l’occasion du célèbre festival de Ravello qui a accueilli toutes les stars de la musique, tous genres confondus.

Un autre fantôme hante ces lieux : Maurits Cornelis Escher. Ce dessinateur néerlandais, prodige de la perspective et des transformations graphiques a vécu ici quelques années et a laissé quelques magnifiques gravures de la côte amalfitaine.

Cimbrone
Toujours à Ravello, la villa Cimbrone mérite elle aussi un séjour prolongé. Construite au début du XXe siècle par un certain Beckett qui n’a rien à voir avec le dramaturge, elle a hébergé notamment le Bloomsbury Group et sa plus fidèle disciple, Virginia Woolf. DH Lawrence, l’auteur de « L ‘Amant de Lady Chatterley », habitait quelques maisons plus loin. Et parmi les visiteurs on relève le sculpteur Henry Moore, Winston Churchill, TS Eliott, le duc et la duchesse de Kent…

Tout ce petit monde appréciait les arabesques néo-gothiques qu’avait multiplié à l’envi Beckett, mais le jardin a de quoi charmer le promeneur des heures durant, ses perspectives, les collections d’essences méditerranéennes, ses massif de rosiers, d’hortensias, ses thématiques du secret et de l’étrange, et sa vue plongeante sur la Méditerranée sont enthousiasmantes. On comprend le plaisir des hôtes des lieux.

Il existe des vidéos « in-board » des trajets en autobus entre Amalfi et Vietri. La route serpente, c’est le mot, au plus près de la roche et du vide au-dessus de la mer. Chaque croisement, chaque dépassement paraissent un miracle. Chaque virage est ponctué de coups de trompe qui ne perturbent pas les nombreux motards et scooters adeptes de sensations.
https://www.youtube.com/watch?v=dUxoHXNLQh4
Journée 5 : Retour à Naples
En Italie, la libéralisation du transport ferroviaire est en avance sur ce qu’elle est d’ores et déjà en France. Pour aller de Vietri à Naples (45km), vous avez le choix entre au moins Trenitalia et Circumvesuvio. Point commun entre ces compagnies : les retards et autres incertitudes sur les horaires. Sur le même quai, vous pouvez avoir deux trains pour la même destination à quelques minutes d’intervalle. Et le retard de l’un peut entraîner ou allonger le retard de l’autre. Méfiance.
A Naples, privilégier le métro, qui dessert une grande partie de la ville pourtant démesurée.
Paolo Coppola, notre hôte des prochaines journées, nous explique que depuis chez lui, nous sommes à quelques minutes de bon nombre de points névralgiques de la cité. Sa raison sociale : « Week-end à Naples ». Tout un programme. Il règne sur un très bel immeuble de rapport, comme on dit à Paris, divisé en appartements aménagés avec un goût très napolitain : belles textures, magnifiques tissus, des dioramas de la vie quotidienne un peu partout, une subtile utilisation de l’espace en mezzanines qui créent des détours, des petits coins bien agréables.

Paolo est notre logeur, mais aussi notre logisticien. Il nous conseille vivement de commencer notre découverte par le Castel Sant Elme, un fort aménagé depuis le XIIIe siècle sur les hauteurs de Naples. Successivement garnison, puis prison, c’est aujourd’hui un lieu de culture, et surtout une terrasse panoramique qui permet de scruter Naples dans toute son étendue. On y observe les collines tranquilles à côté des rues étroites et grouillantes, le port, omniprésent et une constellation de dômes ou de clochers.
Retour vers la vieille ville et le port par une longue descente au travers d’escaliers séculaires très sales.
Ici le piéton est souvent oublié. Les voitures et surtout les scooters en général non casqués, souvent à trois dont un enfant sur la même « bécane » utilisent le moindre espace et on doit se contenter de fort peu pour déambuler.
Comme chaque jour, nous regagnons nos appartements pour une séquence « rafraîchissement » et dépoussiérage. Paolo nous indique gentiment mais fermement une toute petite auberge, « chez Fofo », qui ne paie pas de mine, à quelques encablures de notre pied à terre. Les quelques tablées se partagent les riches ressources de la Campanie : tomates, courgettes, poivrons, citron, morue sous tous ses apprêts. De la simplicité, des produits impeccables. A retenir, malgré une table voisine particulièrement bruyante. Les enfants italiens sont les rois, ou alors les parents sont dépassés, mais l’ensemble est souvent diablement expressif…
Journée 6 : Pompéi
Nous avions précédemment passé un peu de temps à Herculanum. Le thermomètre chauffé à blanc n’avait pas réussi à étancher notre curiosité pour l’antiquité romaine.

Direction Pompéi, beaucoup plus impressionnante que Herculanum. Le site est nettement plus étendu, les monuments et les habitations aussi. Beaucoup de sculptures en assez bon état, et beaucoup d’efforts sont faits par les autorités pour faire de Pompéi une perle du tourisme italien, en faisant appel à des artistes contemporains, ou en introduisant une cafeteria particulièrement choquante en plein milieu du site.
A Pompéi, les travaux continuent, s’ils se sont jamais arrêtés. Les fouilles ont été entamées en 1748, sous Charles Bourbon de Naples. Mais en 79, lorsque le Vésuve explose et recouvre la ville, celle-ci était déjà en reconstruction d’un puissant séisme qui avait eu lieu 17 ans auparavant.
On a souvent cette impression sur les pentes d’un volcan. La vie cherche à s’insinuer dans les interstices de la lave encore chaude, et les humains ne sont pas les derniers à se ruer sur ces terres si fertiles.
On se perd dans Pompéi, et au détour d’une ruelle, on tombe sur une petite équipe affairée à continuer des recherches archéologiques sur ce site parcouru chaque année par des centaines de milliers de paires de pieds. Il y a donc encore des choses à découvrir, en même temps qu’il faut étayer ce qui a été mis au jour et se dégrade sous le soleil, le vent, le public et l’action de la nature.

On en vient parfois à se demander si on ne s’amuse pas avec le public, en alimentant cette soif de découverte sans forcément faire preuve de rigueur scientifique. On a d’ailleurs aussi cette sensation en Grèce et en Crète, où l’antiquité pré-chrétienne représente évidemment une ressource inépuisable.
Après notre passage chez Paolo pour nos indispensables ablutions, direction Sartu, petit restaurant discret de quelques tables à proximité de notre pied à terre. Le propriétaire est, paraît-il, un spécialiste de la noisette pour Ferrero (les fameux Rochers…). Pâtes de première qualité, al dente comme il se doit, accompagnant des produits frais de la Campanie et une débauche de propositions traditionnelles ou plus novatrices, accompagnés d’excellents vins du cru.
Journée 7 : Musée archéologique de Naples
Il est indispensable de se rendre au musée archéologique après la visite de Herculanum et Pompéi. En effet, les fresques, les céramiques, les sculptures et les mosaïques des riches villas ne sont plus sur place. Elles ont à 95% été enlevées, voire découpées et se trouvent pour beaucoup d’entre elles dans cet immense vaisseau.
C’était sans doute plus raisonnable de le préserver des éléments et du pillage, mais on aimerait mieux se représenter à quoi ressemblaient ces architectures souvent audacieuses dans leur écrin d’origine, avec les œuvres qui les mettaient en valeur.
Nous aimerions voir en situation ces panneaux monumentaux, mais aussi ces gracieuses miniatures à la technique si sûre, ces couleurs chatoyantes et pourtant apaisantes, ces traits qui font naître avec une apparente simplicité un animal de compagnie, un enfant, une plante…
Aujourd’hui ces œuvres dorment dans un musée, du sommeil du juste probablement. Mais on aimerait tant les voir contribuer à recréer ces instants de bonheur d’avant la nuée.
Dernière halte gastronomique au Refugio, une petite échoppe qui ne paie vraiment pas de mine, tenue par toute une famille qui régale les Napolitains depuis longtemps. D’ailleurs, à notre arrivée, c’est le calme plat sous les tentures dans la petite cour discrète qui accueille les tablées. Service familial pas forcément souriant, carte mélangeant les fruits de mer, les charcuteries, les « scaloppi » au citron, sans fard, et des pâtes, des pizzas comme on en rêve, à ne plus savoir où donner de la tête.
Dans l’avion du retour, nous nous remémorons avec d’autres passagers la tension napolitaine, le soleil écrasant, les scooters, les détritus, les rues grouillantes. Mais on retient surtout la gentillesse des mamas, les petits coups de klaxons comme autant de signes de présence, la vie bigarrée de Naples et de la Campanie.
On y reviendra c’est sûr !